Le corps figuré
Les figurations du corps Représentations modernes et contemporaines dans l'art du XXe siècle
Gilles Barbier Représentations du corps dans la modernité, images et actions Tout au long du siècle, d'une image à la symbolique plus ou moins visible, de l'icône fustigée par des formes non occidentales enfin reconnues comme artistiques (le primitivisme et tous les collages, assemblages pratiqués), le corps représenté est orienté vers une matérialité appuyée à l'épreuve des actions les plus ritualisées (Beuys), des performances, dont la photographie et le film gardent la trace, mais pas seulement : la photographie, la vidéo (du corps en action, de Pollock aux Actionnistes viennois) font souvent partie de l'œuvre. Fluxus a montré comment un art « total » pouvait rester subversif et Robert Smithson, qui arpente Spiral Jetty (1970) (www.robertsmithson.com/), qualifie la photographie de sculpture mentale. L'héritage des maîtres, ruptures décisives au XXe siècle La représentation du corps porte l'héritage des avatars de la mimesis, et des libérations faites par Cézanne, Rodin, Matisse, Picasso, Dubuffet, les grands maîtres qui ont ouvert le champ artistique aux expérimentations dont le corps reste souvent la mesure représentée ou sous-jacente, néanmoins libérée des codes et des systèmes. La couleur, la ligne, l'espace ont atteint leur plénitude. Le XXe siècle produit des représentations mixtes, hybrides, où se jouent illusionnisme et matérialité, du projet dessiné à l'installation qui rassemble la question de l'in situ, de l'éphémère et des passages possibles d'un lieu à l'autre, dans des pratiques élargies. Ainsi Richard Long (www.richardlong.org/) inscrit-il les déplacements de son corps à l'échelle du monde. La figuration du corps existe toujours, dans des formes artistiques qui se déplacent vers les marges pour revenir au centre (comment faire œuvre ?) en utilisant toutes les références, en parodiant si nécessaire, en recyclant, en détournant les grands médiums, bref en étant encore postmoderne (Lyotard) et critique. Le corps aux limites de la représentation : la force du réel La figuration du corps pose la question des limites de l'art, des frontières et des territoires, des socles et des cadres, du pouvoir des images et des actions ; et aussi de la persistance de la figure, du visage (portrait et autoportrait) comme des interrogations sur la relation à l'humain, à l'intime, dans l'épuisement constaté des classifications, des grilles, à l'ère des réseaux. La figuration du corps pose encore la question d'un rapport toujours plus complexe au réel, entrepris, analysé, traversé et retraversé, synthétisé, cloné par les nouvelles technologies (Fabrice Hybert, Gilles Barbier ou Gilbert & George). Intérieur et extérieur, surface et transparence, profondeur, sensations définissent les relations qu’art et sciences ont entreprises toujours plus intensément au XXe siècle. La représentation du corps participe bien du désir et de la volonté de connaissance, du plaisir et de la séduction des images. La confrontation des différentes représentations du corps dans l'art du XXe siècle doit être pratiquée avec prudence, méthode, en évitant les pièges du voyeurisme, des stéréotypes, en prenant soin de comparer œuvres et commentaires, en prenant du recul, face aux défis de l'horreur individuelle et collective. L'œuvre, la pièce, les supports et les images artistiques restent indissociables des contextes de leur élaboration et de leur reconnaissance. Hélène Sirven
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