Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Leblogducorps
Leblogducorps
Publicité
Archives
20 juillet 2006

La femme en kit Chiennes de garde 2002

A QUAND L’ÉGALITÉ DE PARAÎTRE ?
La femme en kit !
LE CORPS FÉMININ, MATIÈRE ET REPRÉSENTATION

27 août 2002

par Yanne


Le nu vêtu, le corps paré : une poupée décorative !

Le vêtement, la parure, le costume, les modifications corporelles sont l’apanage de l’humanité ; non seulement nous sommes les seuls êtres vivants à nous soucier du paraître, mais de plus, à l’inverse des oiseaux par exemple, les femelles humaines sont en charge de la séduction par tous les artifices possibles ! Peut-on imaginer que si demain les femmes ne se paraient plus, les hommes n’auraient plus de désir et que c’en serait fini de la reproduction humaine ?

Nécessaire pour protéger un corps fragile, peu velu et frileux, le vêtement est aussi un signe de représentation sociale et ethnique. Il intervient comme imposé dans une société ayant intégré la pudeur (sexuelle le plus souvent), enfin il est partie intégrante, en particulier chez les femmes, d’une technique de séduction obligatoire  !

Les modifications corporelles obéissent à deux critères principaux : le rite d’appartenance ou d’initiation (scarifications, tatouages, excisions, plateaux labiaux, anneaux cervicaux, etc.) et le rite de séduction obligatoire basée sur des diktats masculins le plus souvent.

On peut cependant, dans le cas des modifications du corps féminin, faire un parallèle entre les deux motivations : qu’elles soient le fait d’un conservatisme culturel, de traditions ancestrales, de normes collectives et de soumission à ces normes ethniques ou au contraire dues aux influences éphémères de la mode : ce sont en grande majorité les femmes qui en font les frais au bénéfice d’un regard conformiste androcentré.

L’esthétisme des personnes répond à des critères totalement différents :

le néo-narcissisme masculin investit principalement le corps comme réalité indifférenciée. L’homme a une image globale de son corps, à entretenir en bonne santé et en bonne forme : il a peu d’intérêt pour le détail (à part ses rides, son estomac et sa calvitie) ; son désir de paraître est davantage synthétique qu’analytique y compris dans sa façon de se vêtir ; depuis le siècle dernier la mode masculine préfère le neutre, le sobre, le sombre, l’austère !

La dépossession des hommes de l’éclat des artifices au bénéfice des femmes les a vouées à reconduire les symboles de luxe, de séduction, de frivolité inhérents au « beau sexe ».

Les femmes ont un culte de soi structurellement morcelé : Elles n’appréhendent pas une image globale de leur corps. La femme se voit en bribes : peau, paupières, nez, lèvres, yeux, ventre, cuisses, fesses, seins...poils, cheveux, cellulite etc.

Les femmes ont une image analytique de leur corps qui l’emporte sur le synthétique.

L’idéal de la beauté n’a donc pas les mêmes effets sur la relation au paraître, ni la même fonction dans l’identification individuelle, ni la même valorisation sociale et intime.

L’exaltation de la beauté féminine réinstitue au cœur même du narcissisme mobile et transsexuel une division majeure des sexes : division esthétique, culturelle, psychologique et volonté des sexes à manifester par des signes frivoles leurs différences.

Depuis le XIV ème siècle le vêtement s’attache à exhiber les charmes du corps en accentuant les différences de sexe.

Le ventre féminin se porte haut et bombé au XV ème siècle pour valoriser le rôle de procréatrice, puis la taille se marque, les seins émergent et les hanches sont largement rembourrées. Après la révolution, une tentative de se libérer de tous les carcans donne aux femmes l’illusion de revenir à un corps souple et naturel, à la mode antique ; Ce corps libéré est très vite repris en main par le code napoléon qui fait des femmes des mineures à vie dont la vocation est le mariage et la procréation. On assiste donc au retour du corset, qui va perdurer pendant un siècle : donnant l’image d’une femme bien « tenue », bien rigide, dont l’apparence de poupée fragile (en sablier) conforte la toute puissance masculine !

Heureusement, l’avènement et la démocratisation des études pour les jeunes filles, l’arrivée massive de femmes dans tous les milieux professionnels et l’accès aux sports pour toutes, libèrent peu à peu les femmes de leurs contraintes physiques « instrumentées » (corsets, baleines, rembourrages, tournures, juponnages, gaines).

La valorisation immémoriale de "la beauté féminine" s’est largement démocratisée et la revendication du charme, de la beauté et de la séduction n’exclut pas celle du travail et de la responsabilité.

La dénonciation de la femme-objet ne devrait plus faire recette et le droit au vote, à la procréation libre et à toutes les activités professionnelles n’excluent en rien le privilège de la coquetterie et de la séduction !

Aimer la mode n’a plus le sens d’un destin subi ! Se parer, se faire belle, se sentir en forme et séduisante n’a plus rien à voir avec l’aliénation !

Plus d’indépendance, plus de liberté, pour plaire à qui on veut, quand on veut et comme on veut ! et intégrer à la fonction sociale du vêtement une dimension ludique, pleine de fantaisie, d’humour et même pourquoi pas de provocation !

Le dimorphisme sexuel n’a plus le caractère souligné qu’il avait au siècle dernier. Depuis 1960, les femmes se sont arrogé le droit de porter aussi des vêtements masculins ; les femmes, à l’inverse des hommes, peuvent tout porter !

Le travail de diminution des extrêmes n’a pas pour terme l’unification des apparences, mais la différenciation subtile. La consommation et la communication de masses poussent également les individus à la séduction de l’éphémère par la mode.

Auparavant périphérique et désormais hégémonique la mode achevée vit de paradoxes :

son inconscience favorise la conscience,

ses folies l’esprit de tolérance,

son mimétisme l’individualisme,

sa frivolité le respect des droits de l’homme.

Le nu dévêtu, le corps modelé : une poupée érotisée !

Hélas, revers de la médaille, on assiste, en Occident, avec la vulgarisation d’un corps de la femme sexualisé, érotisé et réifié à outrance par les média, la publicité et la pornographie, à la réapparition d’une uniformisation "obligée" des formes féminines. Comme le corset sculptait jusqu’au supplice taille, poitrine et hanches, les régimes draconiens et la chirurgie plastique conforment de plus en plus les femmes au modèle fantasmé masculin et induisent des comportements dictatoriaux : phobie de grossir, régimes loufoques, lipposuccions sauvages, implants mammaires obligatoires, hanches rabotées, fessiers remontés, lèvres gonflées de collagène, peau lissée juvénile ! ! !

Le corps des femmes est de nouveau l’enjeu de contraintes sociales et culturelles, et les techniques les plus sophistiquées sont mises en œuvre pour modeler encore et toujours ce corps féminin comme instrument symbolique de la séduction. Si la mode et les cosmétiques perdurent depuis des siècles, en revanche le modelage anatomique par chirurgie plastique est un phénomène nouveau qui s’amplifie et se démocratise : se faire poser des implants mammaires ou fessiers n’est plus réservé à des femmes riches et vieillissantes, ni à la chirurgie reconstructrice, mais à toute jeune fille insatisfaite de ne pas être conforme au modèle artificiel : poupée Barbie-fantasme-masculin des années cinquante !

Largement représentés dans les productions X, les gros seins, les bouches pulpeuses et les vêtements hyper sexy deviennent le modèle attendu de la séduction féminine : modèles d’ailleurs suivis non seulement pas des jeunes filles désireuses de revendiquer une «  liberté » (conformisme ?) sexuelle, mais aussi par des femmes mariés, vivant en couple, et mères de famille. Ce phénomène social est tout à fait nouveau dans les rapports de séduction.

Faut-il s’en inquiéter ou s’en réjouir ? La ménagère de moins de cinquante ans, « casée » et traditionnellement « hors circuit » est désormais la cible de toutes les sollicitations du paraître : rester jeune, désirable, sexy, dans le coup, toujours la proie du désir masculin ! La mère de famille, rassurante et détachée de la compétition sexuelle du siècle dernier a fait place à une marchandise érotisée conforme au désir masculin, encore et toujours sur le "paraître" sexuel, sous peine d’inexistence !

Autre cible, depuis quelques années les très jeunes filles, à peine pubères, les « Lolita » qui font aussi l’objet d’un très lucratif marché de mode et d’accessoires sexy, encore destinés à reproduire la mode bimbo de maman ! On ne peut s’empêcher de penser qu’on entretient là aussi le stéréotype de la femme-enfant fragile et immature.

Rien de comparable chez les jeunes garçons prépubères, ni chez les jeunes mâles et encore moins chez les hommes mûrs...

La seule contrainte corporelle du sexe masculin est éventuellement la circoncision, qui n’est en aucun cas subordonnée à la séduction.

Les tatouages, percing et autres modifications dermiques décoratives, la musculation et la mode masculine sont souvent le fait de désirs narcissiques individuels, égocentriques et sans contrainte sociale autre que rituelle chez certains peuples ou groupes sociaux. Je mets à part le paraître de certains gays, qui se conforment aux mêmes stéréotypes de séduction hyper sexualisée : l’efféminé ou le tout cuir (sado maso) par exemple.

Avec la persistance de la disjonction du paraître des sexes, il y a comme un échec de la dynamique égalitaire, qui ne peut parvenir à aller au bout de ses dissemblances.

Oui, on assiste à une résistance opiniâtre au travail de l’égalité qui révèle la force d’un principe social antinomique et machisant s’enracinant dans le fond des âges : La Sacralisation de la beauté féminine !

Une beauté fantasmée, stylisée, idéalisée, magnifiée, inventée, fabriquée dont l’impératif esthétique demeure : jeunesse et sexe ! Voyez l’idole sexuelle, maquillée, sexy, provoquante, objet de tous les rêves érotiques masculins !

On en arrive à la création virtuelle et à la fabrication de femmes-poupées de silicone moulé, représentant la créature érotique idéale et enfin... muette !

A quand l’égalité de paraître ?

Il semble que tout est mis en œuvre pour que les femmes soient condamnées à n’être que matière inerte et malléable, à l’inessentialité, à la facticité ! En fonctionnant dans cette univers d’oppression et d’asymétrie corporelle, les hommes doivent se saisir comme purs esprits et les femmes comme pure matière !

Comme dit Simone de Beauvoir, les femmes ne sont pas nées femmes mais le sont devenues ! « ... L’homme se constitue en sujet, il saisit son corps comme une relation directe et normale avec le monde qu’il croit appréhender dans son objectivité, tandis qu’il considère le corps de la femme comme « autre », alourdi par tout ce qui le spécifie : un obstacle, une prison.. »

Quelle paradoxe que cette esclavage du paraître féminin, quand la femme est de toutes les femelles mammifères celle qui se révolte le plus contre l’asservissement à la fonction reproductrice ! Pourtant son corps reste encore le territoire de l’oppression.

Si, comme le prônait Simone de Beauvoir, la libération des femmes passe par l’égalité civile et politique et surtout par l’indépendance économique, s’il y a réconciliation du corps et de l’esprit, il n’est pas question pour les femmes de renoncer à leur féminité... Cruel dilemme : seul un monde androgyne permettrait aux femmes de ne calquer leur comportement ni sur le modèle masculin ni sur l’obligation de paraître féminin. Le corps féminin ne serait plus encensé, modelé, réifié par ses attributs érotiques, l’égalité du paraître serait porteur du devenir, du penser, de l’être !

Yanne
Chiennes de garde - http://chiennesdegarde.org/article.php3?id_article=194

Le corps des femmes est de nouveau l’enjeu de contraintes sociales et culturelles, et les techniques les plus sophistiquées sont mises en œuvre pour modeler encore et toujours ce corps féminin comme instrument symbolique de la séduction

Publicité
Publicité
Commentaires
M
En fait je me disais hier en travaillant sur tout autre chose que il pourrait être interessant de se poser la question de quel "pouvoir" est attribué à ces corps masculins et féminins qui fait que l'on ritualise ainsi certaines parties plutôt que d'autres, et à qu'elle question ou problématique spécifique de notre société cela correspond ... si bien entendu on admet que le corps symbolise tout. il me semble plus aisé et riche de travailler ainsi que dans un jugement virulent ... voilà
M
Je ne sais comment dire, mais quelque chose me reste en travers de la gorge dans cet article et dans le discours hyper "féministe" qui le soutend ... et cela me dérange profondément, en temps que personne humaine, mais aussi en tant que femme ... je peux entendre beaucoup des choses qui y sont incluses (pour sûr puisque cette notion du paraître va occuper une des parties de mon temps de travail des années à venir pour ma thèse) mais le "jugement moral" sur une société machiste est injuste à mon goût ... Je pense que dans ce qui et dénoncé aussi sur le paraître des hommes il y aurait des "contraintes" sociales tout aussi fortes à chercher, et auxquelles il est tout aussi dur d'echapper, et que pour partie c'est le jugement "sexuel" des femmes qui peut aussi en être perçu comme un déclencheur .. un dicdat me semble également à l'oeuvre ... Bref j'aurais envie d'en parler longtemps, mais pas le temps là ... même si il me semblait important de dire un peu ... J'aime la justice je crois au delà de tout
Publicité