Mort d'Yves Rocher
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"Yves Rocher naît le 7avril 1930. Le jeune garçon de 14 ans, orphelin
de père, doit cesser l'école pour aider sa mère au magasin de tissus.
Sa fibre commerçante s'éveille sur les marchés de la région. Pour
développer le commerce familial, il a une première idée: la vente
d'inhalateurs. Et il a 25 ans, quand il est saisi d'une idée lumineuse:
la fabrication d'une pommade miraculeuse contre les hémorroïdes, à base
de ficaire, qu'il commence à confectionner dans le grenier familial,
selon une recette mise au point par une guérisseuse. Il invente dans la
foulée une nouvelle méthode commerciale, en passant une annonce dans la
presse parisienne. La vente par correspondance est née.
Fabuleuse intuition
Le succès ne se fait pas attendre. Débordé par les commandes, YvesRocher doit construire un premier atelier à La Gacilly où démarre une véritable fabrication de produits cosmétiques. Pour se faire connaître, il utilise la publicité, soigne le conditionnement et publie un catalogue. «En 1966, alors que j'étais assistant à la fac à Rennes, je collaborais à une petite boîte de graphisme qui travaillait pour YvesRocher. J'ai pu découvrir alors sa fabuleuse intuition commerciale. Il avait compris que les ménagères avaient du mal à pousser la porte d'une parfumerie. Et cette intuition s'est doublée d'un talent de capitaine d'industrie», relate JosephKerguéris, l'actuel président du conseil général du Morbihan.
Discret et sensible
À la fin des années 60, YvesRocher ajoute une autre pièce à l'édifice qu'il est en train de construire. Il ouvre sa première boutique à Paris et rapidement 200 autres en France, puis en Belgique et en Allemagne où ses produits à base de plantes font un tabac. Il crée aussi les laboratoires marins Daniel Jouvance, rachète les produits de maison Stanhome. «C'était un visionnaire», considère Paul Anselin, ancien maire de Ploërmel et collaborateur d'YvesRocher de 1988 à 1993. «Il m'avait confié la filiale financière, la Pardib. C'était un homme profondément humain, sensible comme tous les grands séducteurs». Mais YvesRocher était aussi un grand discret. «J'ai eu l'occasion de le voir chez lui à Paris. Ce n'était pas un mondain, il parlait peu, mais ses mots étaient pesés», souligne François Goulard, député-maire de Vannes. Yves Rocher vivait entre la capitale, Saint-Malo, son château de Glénac et le Maroc.
Attaché au Morbihan
Dans le Morbihan, cette disparition est douloureusement ressentie. L'industriel, bien qu'ayant acquis une taille mondiale, y a toujours conservé une partie de ses bases, particulièrement à LaGacilly où son groupe a investi, ces dernières années, 20M€dans une usine logistique et où il a conservé l'écharpe de maire de 1962 à 2008 - son fils Jacques lui a succédé - en ayant été également conseiller général (divers droite) du canton, de 1982 à 2001. Yves Rocher n'avait pas aussi bien réussi en politique, malgré l'appui de Raymond Marcellin, l'homme clé du Morbihan. Il avait subi un échec aux sénatoriales de 1992 et sa liste aux régionales n'avait obtenu que 13,3%. Il ne participait guère aux séances de l'assemblée départementale à Vannes. «C'était secondaire pour lui compte tenu de ses activités», dit François Goulard. Mais en ayant donné au Morbihan, il savait que, dans d'autres circonstances, il pouvait compter sur son département natal. Ce qu'il vérifia, en 1989, lorsque près de 15.000 personnes, élus, salariés et sympathisants, manifestèrent derrière lui dans les rues de Vannes pour le soutenir dans le cadre d'une affaire l'opposant à la BNP lors de l'achat de l'entreprise «Petit Bateau».
- Gabriel Simon et Emmanuel Nen
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