Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Leblogducorps
Leblogducorps
Publicité
Archives
3 février 2009

Mort du créateur des Play Mobil, Hans Beck

Playmobil - Des petits bonshommes en or

Elles sont plus de 2 milliards dans le monde, dont une bonne partie en France. Mais qui donc ? Les figurines Playmobil, produites depuis plus de trente ans dans un petit bourg de Franconie, près de Nuremberg. Retour sur une surprenante réussite née... de la crise pétrolière.

Pascale Hugues, envoyée spéciale à Zirndorf

Ils ont 7,5 centimètres de hauteur. Ils peuvent lever les bras, agiter les jambes et tourner la tête. Ils ont une grosse tête, deux points pour les yeux, un trait pour la bouche. Il y a un chevalier en armure, un pirate sur son navire, un paysan au volant de son tracteur. Impossible d'imaginer aujourd'hui une chambre d'enfants sans les petits bonshommes de Playmobil. L'histoire de Geobra Brandstätter, l'entreprise familiale fondée en 1876 qui les a mis au monde, ressemble à un conte de fées. Quand Smoby, premier fabricant français de jouets coule, le premier fabricant allemand roucoule.

Ce qui n'a pas toujours été le cas. Logée dans la campagne de Franconie, près de Nuremberg, Geobra Brandstätter fabriquait tranquillement de bon vieux jouets en plastique. Jusqu'à ce que le choc pétrolier de 1973 fasse s'envoler le prix des matières plastiques. Comment réagir ? Le patron, Horst Brandstätter, ne se laisse pas abattre et demande à son designer, Hans Beck, de trouver des jouets qui rendent l'entreprise moins dépendante du prix du baril. A l'époque, les jeux de construction (Meccano, Lego) sont à la mode en Allemagne. Hans Beck réfléchit : il faut des jouets très petits. C'est ainsi qu'il met au monde une figurine qui tient dans une main d'enfant. Le bonhomme Playmobil est né ! Il fonctionne par thèmes. Le 2 février 1974, un chevalier, un Indien et un ouvrier sont présentés à la foire du jouet de Nuremberg, accompagnés de leurs accessoires. Succès immédiat pour une idée de génie. Plus de 2 milliards de figurines peuplent aujourd'hui les chambres d'enfants à travers le monde. Geobra Brandstätter appartient à ces solides PME allemandes (402 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2006 et 2 700 employés) accrochées à un terroir mais très internationales. Avec Playmobil, elle tient tête aux géants Mattel (Barbie) et Lego. La France est le premier marché étranger des fameux bonshommes en plastique (5,3 % de part de marché).

Le succès n'est pas monté à la tête de Horst Brandstätter. Difficile d'imaginer que le grand homme qui traîne en sandales et jeans avec son chien dans le hall d'entrée du siège de Playmobil à Zirndorf est un patron millionnaire, l'un des plus respectés d'Allemagne. Horst Brandstätter, 74 ans, vient chaque jour au bureau. Il conserve les commandes et son feu vert est toujours nécessaire pour lancer une nouvelle ligne de jouets. Cet amateur de cigares et de thé passe la moitié de l'année à jouer au golf sous le soleil de Floride. « Pour que mes employés apprennent à marcher tout seuls et soient capables de prendre le relais quand je ne serai plus là ! » C'est ainsi qu'il justifie ses longs mois d'absence. Sa succession est déjà organisée. Elle ne bénéficiera pas à ses fils, qui ont fait carrière dans d'autres branches. Horst Brandstätter a choisi une femme, Andrea Schauer, 48 ans, pour tenir les rênes de la maison. Il a également mis en place une fondation de sorte que nul ne pourra racheter son empire. Pas question non plus, comme le font ses concurrents, de délocaliser en Chine - 80 % des jouets (exception faite de Playmobil) sont produits en Asie. « Si le gros de la production se fait en Allemagne, ce n'est ni par patriotisme ni par sentimentalisme », explique Andrea Schauer, précise et enthousiaste quand elle parle de ces petits bonshommes qui partagent sa vie depuis quinze ans, date de son entrée dans la maison.

Une expérience de délocalisation, poursuivie pendant six mois, avait d'ailleurs mal tourné. « Nous ne réalisions aucune économie , constate Andrea Schauer. Le personnel était moins bien qualifié et les délais de livraison, huit semaines de la Chine à l'Europe, étaient beaucoup trop longs. Dangereux quand Noël approche. »


Rude concurrence. Aujourd'hui donc , les grosses pièces, les socles, les bâtiments, les véhicules, le bateau des pirates sont fabriqués dans les usines allemandes (60 % de la production). Les figurines sont produites à Malte (30 %). Et les petites pièces sont triées à la main et rangées dans leurs sachets par les 80 employés de l'usine de République tchèque, à une heure et demie de Zirndorf, où le salaire horaire est de 4 euros l'heure, contre 22 en Allemagne. Une flotte de camions fait la navette jour et nuit. A l'arrivée à Zirndorf, les sachets sont pesés au milligramme près pour s'assurer qu'aucune minuscule roue, qu'aucune petite fleur ne manque. La production est presque entièrement automatisée grâce à des dizaines de robots téléguidés par ordinateur. Les boîtes de jouets sont stockées dans de gigantesques hangars. Brandstätter a investi 300 millions d'euros au cours des six dernières années dans ses sites allemands. Il a même créé un parc d'attractions à côté du siège.

Chez Playmobil, la mission éducative n'est jamais perdue de vue. On s'en tient toujours à une règle simple : pas d'armes, pas de violence gratuite, pas d'horreur, pas de bruitages électroniques. « Avec des panzers et des avions de combat, on peut faire beaucoup d'argent , explique Andrea Schauer, consciente de sa responsabilité morale. Nous avons augmenté notre chiffre d'affaires sans nous prostituer. » Tout de même, des petit écarts sont commis. Un policier qui crie « haut les mains » sans pistolet n'est pas crédible. Mais quand on examine les figures de guerriers, produits par la concurrence, alignées dans le bureau d'Andrea Schauer, on comprend combien il est difficile pour Playmobil de rester fidèle à sa philosophie : « Plus ils grandissent, plus les garçons sont difficiles à séduire. Dans le temps, un garçon de 14 ans jouait encore avec Playmobil. Aujourd'hui, un garçon de 8 ans est fasciné par les jeux vidéo et les jouets plus agressifs », dit Schauer. La station spatiale créée par Playmobil a été un flop. Trop naïve, trop simpliste, trop charmante, pas assez futuriste. Les garçons préfèrent les licences « Star Wars », le bruit.


Le chevalier, une valeur sûre. Pas question pour autant de baisser les bras. « Les visages de nos figurines sont sans expression, explique Andrea Schauer . Aux enfants d'imaginer la joie, la tristesse pour les accompagner dans l'histoire qu'ils se racontent. Nous ne voulons pas brider leur fantaisie. Pour les filles, les poupées classiques sont en nette perte de vitesse. Il y a moins de mamans cintrées dans leurs tabliers aujourd'hui. Nous avons lancé des infirmières, des médecins qui évoquent la vie active. » Pour se mettre à hauteur des enfants, la future patronne s'assied souvent sur le plancher de leur chambre pour comprendre comment ils jouent et pénétrer leur univers. L'hôpital fut l'an dernier un gros succès. Le cow-boy, en revanche, est en train de passer de mode. Le chevalier reste une valeur sûre. Le pirate en est à sa quatrième génération. Très prisés sont les jouets qui rappellent la vie courante des enfants : la station de police, la voiture de pompiers, la maison familiale, le zoo. A l'occasion de la Coupe du monde de football en Allemagne, l'an dernier, Playmobil a créé le premier joueur de foot qui peut - grâce à une petite manette facile à actionner - donner un coup de pied dans un ballon. Parfois les designers de Playmobil font face à de vrais conflits éthiques, comme lorsqu'ils ont sorti une crèche à Noël, sans kitsch ni fioritures. Les enfants adorent. La crèche est même utilisée pour certains cours d'instruction religieuse. Destinée inattendue pour ces drôles de figurines

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité