Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Leblogducorps
Leblogducorps
Publicité
Archives
18 juillet 2008

Archives Eros

« La transgression existe-t-elle encore? | Accueil

17/07/2008

Le porno des ancêtres

A quoi ressemblaient les jeux érotiques de nos arrières grands-mères? Avec ses trois mille photos érotiques datant de 1850 à 1950, le tout nouveau site Archives d'Eros recense un siècle de lubricité.

Archivesderos

Alexandre Dupouy, propriétaire de la librairie érotique les Larmes d'Eros et collectionneur de photos pornographiques anciennes, vient de créer avec archives d’Eros une banque d’images à la crudité saisissante.

De toute évidence, nous n’avons rien inventé. Il y a quatre générations, ça y allait: “Des couples de femmes, des positions extrêmes, des orgies avec des dizaines de protagonistes, le SM qui atteint son apogée à la fin des années 30, etc.” Pour Alexandre Dupouy, rien de nouveau sous le soleil.

Les interdits sont différents à chaque époque, mais globalement c’est toujours la même vitalité sexuelle qui se cache sous la censure. “Dès 1850, les condamnations pour obscénité pullulent, explique-t-il. Sachant que de toute façon la censure leur ferait des misères s'ils étaient attrapés, les photographes n'avaient aucune retenue.”

Il se dégage en effet une vigueur, une puissance presque obscène de ces images aux tons sepia. Les femmes affichent des croupes de déesse ou écartent les cuisses sur des buissons ardents.

Les hommes, tout moustachus, leur dévorent l’entre-jambes avec un solide appétit… Est-ce qu’ils s’amusaient plus que nous? Etaient-ils plus libres? Ou plus refoulés? “Ni l'un, ni l'autre, répond Alexandre. Chaque époque possède son contingent de plaisirs et de frustrations. Les deux souvent mêlés. Chaque décennie est différente: 1790 était une époque libérée (par certains côtés), 1810 non, 1830, un peu mais pas 1850, 1870 oui dans certains milieux, 1900 aussi, mais pas 1914, 1920 oui jusqu'en 1938, mais un couvercle de plomb de 1939 à 1968 avec seulement une petite fenêtre entre 1945 et 1950 à Saint-Germain-des-Près.

C'est ce côté «petite histoire des mœurs d'antan» qui passionne Alexandre. Sans aucune nostalgie, il propose donc ces milliers de clichés comme autant de témoins du tourbillon des moeurs.

Regarder ces images, c’est déjà apprendre à se méfier des phrases: «On vit une époque formidable !» et «C'était mieux avant». Regarder ces images, c’est aussi apprendre à aimer des corps très différents, dans l’infinie diversité des formes de culs, de hanches, de seins ou d’organes génitaux…

Pour Alexandre, il y a quelque chose de libérateur dans ces photos anciennes. Elles nous réapprennent qu’il existe d’autres anatomies que le modèle standard actuel.  “C'est bien là une particularité de notre époque, de montrer toujours le même corps de femme, toujours dans la même situation: une blonde d'Europe de l'Est, épilée, sexe ouvert, regard éteint ou semblant dire qu'elle nous attend depuis toujours. C'est tellement évident et tellement rabâché qu'on ne s'en rend compte qu'en découvrant des photographies anciennes qui soudain nous font nous exclamer: «Oh ! Ce ne sont pas les mêmes corps qu'aujourd'hui !» Bien sûr, puisque aujourd'hui, c'est toujours le même qui nous est offert !”.

Ces photos, Alexandre les gardait comme un trésor depuis longtemps. Sa vie semble marquée toute entière par "l’archéologie de la fesse". Il est né en 1955 à l’Hôpital Lariboisière, à quelques pas du Musée de l’Érotisme, et grandit au cœur du quartier Barbès, rue Belhomme, «fréquenté par des filles jetées sur le trottoir par le décret “Marthe Richard” de 1946.»

Les prostituées lui offrent des bonbons «ouvrant ainsi son goût pour le plaisir» dit-il. Gourmand, le voilà qui hante les greniers des pavillons de banlieue, où il déniche des photos polissonnes parmi les vieux albums de famille. A partir de 1974, il écume les marchés aux puces de toute la France et fréquente les salles de vente avec l’obsession de l'image licencieuse, interdite. “À l’époque, amasser la photographie ancienne n’a pas de sens, la photographie érotique encore moins», dit-il.

Et pourtant, Alexandre s’inscrit dans les traces de glorieux prédecesseurs: il récupère ainsi des morceaux de la collection Michel Simon, obsédé sexuel notoire qui possédait plus de 100 000 curiosa et objets de collection… «Michel Simon tenait une partie de sa collection de Pierre Louÿs, lui aussi érotomane dont l'érudition et la connaissance de son sujet sont parvenues jusqu'à nous. Il y a comme de la filiation autour de ces images qui passent de main en main, à différentes époques. Chacun lui ajoute d'autres documents, renonce à certains mais tous ont en commun de vouloir préserver les divers regards que les artistes, les photographes, ont posés sur leurs modèles. Ils veulent préserver de l'oubli ces corps offerts pour l'éternité, corps offerts aux regards tant que quelqu'un daigne s'y arrêter.

Sur Archive d’Eros, les images sont classées par thèmes (toilette, bonnes, culottes, triolisme, nonnes et moines, olisbos, académie, Corydon, modèles célèbres, music hall, moeurs libertines, moeurs parisiennes, prostitution, étranges plaisirs). Chaque mois, une centaine de nouveaux clichés sera ajoutée, ainsi que des thèmes à la demande des visiteurs.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité